OGILVIE, Bertrand. Le travail à mort - au temps du capitalisme absolu. Éditions L’arachnéen, 216 p., 2017.

 

 

« Ce livre témoigne d’une réflexion menée pendant une dizaine d’années sur le travail. Il porte la trace d’un déplacement d’accent qui ne devait pas être effacé : l’hésitation qu’il recèle est en elle-même un enjeu. En effet, passer d’une reconnaissance de la dimension émancipatrice du travail comme lieu de désobéissance possible à l’accentuation de son lien à la mort, au négatif, présent dès le départ mais qui l’emporte de plus en plus dans le contexte néolibéral, ce n’est pas changer d’avis sur la signification de la dimension laborieuse de l’existence sociale, mais accepter qu’elle soit le lieu d’une contradiction pour l’instant insoluble. Au lieu d’opposer les deux libérations du travail, celle où le travail se libère et celle où l’on s’en libère, il faut sans doute essayer de penser comment on ne peut se libérer du travail qu’en le libérant. La question cruciale est de savoir laquelle des deux libérations domine l’autre, ou laquelle s’effectue sous domination de l’autre. Disons que l’orientation de ces réflexions penche plutôt vers l’idée que, dans le contexte d’une lutte politique, la libération du travail, sa réorganisation, ne devrait se faire que dans la perspective de son abolition, mais que cette abolition ne peut s’amorcer que sur la base de sa réorganisation (ou de sa désorganisation...). Par ailleurs, les destructions à l’œuvre dans le monde du travail ne peuvent aucunement être confondues avec l’abolition du travail, elles en constituent plutôt une métamorphose qui déploie au maximum sa négativité, et qui renforce le travail tout en le dépassant. Souligner cette perspective, c’est faire apparaître du même coup d’autres orientations, dans lesquelles son dépassement pourrait œuvrer au contraire à son abolition. » (Bertrand Ogilvie)

Le Travail à mort est scandé par des photographies (les auteurs : Ahlam Shibli, Lewis Hine, Florian Fouché, Jeff Wall, Antonios Loupassis & Marc Pataut) qui, dans des contextes différents et selon différentes approches, traitent également du travail. Elles n’illustrent pas plus les textes que ceux-ci ne commentent les images. La cohabitation des deux registres est de l’ordre de la consonance.