Colloque. François Châtelet 25-27.06.2015

FRANÇOIS CHÂTELET
UN PHILOSOPHE AU PRÉSENT

Colloque international

Université Paris 8, 2 rue de la liberté, Saint-Denis – métro ligne 13 Saint-Denis Université - Jeudi 25 et vendredi 26 juin 2015, amphithéâtre X, 9h15 – 17h30

Maison Heinrich Heine, CIUP, 27c bd Jourdan, RER B & tramway T3, Cité universitaire - Samedi 27 juin 2015, 9h15-18h

 

 

Organisé par le Collège international de philosophie (CIPH), l’axe de recherches « Hétérogénéité des mondes et logiques de l’émancipation » du LLCP EA 4008, le laboratoire SOPHIAPOL EA 3932 de Paris Ouest, avec le soutien de l’Aide à la recherche de l’Université Paris 8 et de la Maison Heinrich Heine.

Coordination : Yves Duroux, Frank Jrezejewski, Nathalie Périn, Emmanuel Renault, Diogo Sardinha, Patrice Vermeren.

 

FRANCOIS CHÂTELET, NÉ EN 1925, EST DÉCÉDÉ À PARIS LE 26 DÉCEMBRE 1985. L’ANNÉE 2015 MARQUERA, par conséquent, et les 90 ans de sa naissance et les 30 ans de sa disparition. Mort un an après Michel Foucault et dix ans avant Gilles Deleuze, F. Châtelet, relativement à ses amis disparus, est quelque peu tombé dans l’oubli. Sortir le philosophe de cette minoration est sans nul doute le moteur de ce colloque. Auteur, professeur, penseur engagé dans les traverses de son temps, François Châtelet montre une manière d’être philosophe et une philosophie sans pareilles. Désembastiller la philosophie, la rendre accessible, populaire, est sans conteste la caractéristique essentielle de ce geste de création si l’on songe encore à son activité de « journalisme philosophique ». Cette ouverture de la philosophie est aussi au fondement du geste institutionnel du philosophe marquant d’un esprit commun aussi bien la direction, confiée par M. Foucault, à partir de 1970, du département de philosophie du Centre Universitaire Expérimental de Vincennes, aujourd’hui Université Paris 8, que, en 1983, la création du Collège International de Philosophie avec J. Derrida, J.-P. Faye et D. Lecourt. A l’opposé d’une commémoration, faire resurgir l’immense intérêt de ce philosophe consiste alors moins à considérer son œuvre comme un objet que comme une aide pour penser la place de la philosophie aujourd’hui dans nos sociétés aux démocraties par trop formelles.

OEUVRE reproposant une histoire de la philosophie et assurant la transmission des idées en se donnant pour partie en collectif, les travaux de François Châtelet dessinent au long d’une série d’ouvrages une façon propre de faire de la philosophie  : Histoire de la philosophie (1972-1973), Les Marxistes et la politique, (1975), Histoire des idéologies (1978), Les conceptions politiques du XXe siècle (1981) Histoire des idées politiques (1982) ou le dernier,posthume, Dictionnaire des œuvres politiques (1986). Deleuze y voyait la singularité de François Châtelet, car la mise en pratique (plus que par lui-même, plus que par Foucault) de cette idée de la fonction auteur, comme fissuration de l’Auteur unique, unitaire, propriétaire de ses ouvrages, de ses idées, est le pendant d’une philosophie à l’œuvre pouvant se recouper par la critique de la raison historique, c’est-à-dire, politique.

Grande oeuvre et pourtant peu lue. Il faut souligner qu’elle nous est en grande partie méconnue. On ne peut en effet la résumer aux ouvrages (écrits seul) qui la façonnent : Périclès (1960), Naissance de l’histoire (1962), Logos et Praxis (1962), Platon (1965), Hegel (1968) puisque Châtelet a aussi pratiqué un « journalisme philosophique », comme il le disait lui-même, dont, aujourd’hui, faute de republication, aucune trace publique ne reste. Certes, Châtelet avait pu montrer un échantillon de ce travail avec Questions Objections, cela dit non réédité depuis sa sortie en 1979. Les revues, les magazines dans lesquels Châtelet a écrit le montrent ainsi au fait et au faîte des publications, des débats de la vie intellectuelle française d’après seconde guerre mondiale : L’Étincelle, Arguments, Critique, Raison présente, La Quinzaine Littéraire, Le Nouvel Observateur, Le Magazine Littéraire sans parler des interventions dans Le Monde ou Libération. Cette oeuvre, qui se donne dans l’éclatement, manifeste, comme Deleuze, Lyotard et René Schérer ont pu le relever, une manière d’être philosophe et une philosophie à nulles autres pareilles. La multiplication des lieux d’écriture, d’intervention, dévoilent un geste philosophique que l’on peut dire issu des Lumières (Diderot, Kant). Désembastiller la philosophie, la rendre accessible, populaire, est sans nul doute le moteur de cette œuvre écrite. Partage des connaissances, de la démarche philosophique de pensée, que Châtelet, cependant, ne réserve pas au seul domaine de l’écrit comme le montre son importante présence audiovisuelle. Loin de se comprendre comme vulgarisation, la philosophie populaire est mue par l’intelligibilité maximale à donner au public, par principe, intelligent. Exiger la clarté des idées, la rigueur, la légitimation, soit les preuves de ce que l’on avance, est pensé en direction du public qui doit pouvoir se positionner (accepter et rejeter, être actif autrement dit) par rapport à ce qu’il reçoit. À cet égard, on a pu parler d’une « communicabilité de la raison critique » pour caractériser cette démarche philosophique populaire.

Décloisonner la philosophie, l’ouvrir pour la mettre en commun, François Châtelet n’a donc eu de cesse de défendre ce genre de la pensée, constitutif de cet agôn généralisé définissant la société démocratique vivante, c’est-à-dire en bonne santé. C’est par là que se comprend toute l’attention du philosophe à l’enseignement de la philosophie par l’abord du rôle idéologique qu’on lui réserve dans les programmes. On connaît en effet l’importance de La philosophie des professeurs (1970) en tant qu’ouvrage, non pas seulement pamphlétaire, mais précurseur d’une réflexion sur la place et la fonction de la philosophie. Réflexion qui sera au coeur du mouvement mené par Jacques Derrida et le Greph, que Châtelet accompagnera de toute la force de ses interventions écrites et parlées, lorsqu’il s’est agi pour eux tous, à partir de 1974-1975, de défendre cet enseignement menacé de disparaître au lycée.

On le sait, François Châtelet a été un philosophe engagé, anticolonialiste, en cela marqué par Sartre et Les temps modernes, qui, après l’obtention de l’agrégation en 1948, choisit immédiatement de partir enseigner en Algérie où son engagement sera total auprès des mouvements de libération. De même ira-t-il à Tunis où il retrouvera son ami René Schérer. De retour en France en 1954, son engagement au PCF sera à comprendre dans cette optique de continuer à agir auprès du mouvement des opprimés sans jamais pratiquer l’allégeance au matérialisme dialectique dont il ne cessera de pourchasser les impasses théoriques. Philosophe signataire du Manifeste des 121, ayant fait partie du premier groupe de réflexion constituant le P.S.U, ancêtre du Parti socialiste, cet engagement militant va laisser place — aux alentours de 1965, comme il le dit dans Chronique des idées perdues (1977) — à un engagement d’un autre ordre, en relation à l’ « animal de la culture » qu’il prend conscience d’être, celui pour la philosophie même.

Mais quelle philosophie ? Une philosophie débarrassée de la forme Savoir. Ainsi en est-il de la philosophie populaire digne de ce nom : travailler à défaire, c’est-à-dire à diagnostiquer, cette forme à l’œuvre. D’où, par exemple, et bien qu’admirés, la distance (dans le mode collectif) d’avec l’encyclopédisme de Diderot et d’Alembert, mais la reconnaissance pour essentiel du travail critique kantien relativement à l’absolu de la raison. Cette critique de la forme Savoir sera au centre des institutions que Châtelet a gérées ou aidées à créer. Il s’agit bien évidemment de la direction, confiée par Foucault, à partir de 1970, du département de philosophie du Centre Universitaire Expérimental de Vincennes, aujourd’hui Université Paris 8, et, en 1983, de la création du Collège International de Philosophie avec J.Derrida, J.-P. Faye et D. Lecourt. Ces institutions, dont l’esprit commun est évident, ont mis a jour une pratique philosophique novatrice, qui, pour défendre la philosophie, pour l’affirmer, n’a pas moins cherché à la penser hors d’une position de Pouvoir dans l’ordre du Savoir. Hégémonie onto-encyclopédique, tribunal de la Raison, c’est « le conflit des facultés » mais encore la philosophie idéologique de Victor Cousin qui sont mis en question.

Ces journées consacrées à François Châtelet veulent ainsi faire resurgir l’intérêt de cette œuvre, l’éclairage qu’elle jette sur un moment philosophique français, la pointe qu’elle s’est voule d’une pratique et d’une conception renouvelées de la philosophie.

 


 

Jeudi 25 juin 2015 – Université Paris 8, Amphi X

 

9h15 – Ouverture : Noëlle Châtelet (écrivain), Diogo Sardinha Diogo Sardinha (Président de l’Assemblée collégiale du CIPh), Danielle Tartakowsky (Présidente de l’Université Paris 8), Jean-François Balaudé (Président de
l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense), Patrice Vermeren (Directeur du Département de philosophie de l’Université Paris 8), Emmanuel Renault (Université Paris Ouest Nanterre La Défense)

 

Séance présidée par Emmanuel Renault (Université Paris Ouest Nanterre La Défense et Laboratoire SOPHIAPOL)

10h00 – Patrice Vermeren (Université Paris 8, LLCP EA 4008) : François Châtelet et la liberté des insensés.

10h30 - Philippe Roy (Chercheur à la MSH Paris Nord) : La voie gestuelle diagrammatique

11h00 - Discussion

11h30 - Projection du film de Ivan Chaumeille : Avec François Châtelet, un voyage différentiel

 

Séance présidée par Mohamed Ben Mustapha (Université Paris VII, Laboratoire SPHÈRE)

13h45 - Guilherme Soares Dos Santos (Université Paris 8, LLCP EA 4008, ED 31) : Châtelet et Deleuze : Regards croisés

14h15 - Rodolphe Edou Nkoghe (Université Paris 8, LLCP EA 4008, ED 31) : Le Jean-Jacques Rousseau de François Châtelet, Réhabilitation d’un philosophe ignoré

14h45 - Amirpasha Tavakkoli (Université Paris 8, Psychanalyse, Laboratoire « La section clinique », ED 31) : Quelle place occupe l’archéologie du savoir philosophique dans les écrits de Châtelet ?

15h15 - Discussion/Pause

15h45 - Gustavo Celedon (Université de Valparaiso, Laboratoire tournant de philosophie Paris 8 LLCP EA 4008) : L’idée philosophique : un art au-delà de la communauté des connaissances

16h15 - Archive télévisée (I.N.A.), François Châtelet : Le droit à la culture, Production France Région 3, 27/12/1976, durée 15’.

16h30-17h30 - Table ronde dirigée par Diogo Sardinha et Yves Duroux : Le Collège et l’Université.

 


 

Vendredi 26 juin 2015 – Université Paris 8, Amphi X

 

Séance présidée par Yves Duroux.

9h30 – Carlos Lobo (CIPH) : François Châtelet. De l’histoire à la géopolitique des concepts

10h00 - Lucie Rey (Université de Lyon, Labex COMOD et Université Paris 8, LLCP EA 4008) : François Châtelet, historien de la philosophie

10h30 - Discussion

11h00 - Fathi Triki (Université de Tunis et Chaire Unesco de philosophie pour le monde arabe) : La culture historienne et la philosophie ouverte chez François Châtelet

11h30 - Anne Lefebvre (Collège International de Philosophie) : Relire Platon pour penser l’articulation du technique et du politique. Simondon avec et
après Châtelet.

12h00 - Discussion

 

Séance présidée par Franck Jedrzejewski (Vice-Président de l’assemblée collégiale du CIPh)

13h45 – Bruno Cany (Université Paris 8, LLCP EA 4008) : Philosophie du langage et anthropologie. Le Platon de François Châtelet

14h15 - Bernardo Correa Lopez (Universidad Nacional de Columbia, Bogota) : L’intellectuel selon François Châtelet.

14h45 - Discussion / Pause

15h15 - Toni Negri (Philosophe) : François Châtelet, une rencontre.

15h45 - Plinio Prado (Université Paris 8, LLCP EA 4008) : D’un style d’enseignement à Vincennes : Châtelet, Deleuze, Lyotard.

16h15 - Discussion

17h30-18h30 - Table ronde dirigée par Georges Navet (Université
Paris 8, LLCP EA 4008) : La philosophie et l’Etat, avec Maria Rita Cesar,
Le Brésil contemporain : philosophie, éducation et ouverture à la société.

 


 

Samedi 27 juin 2015 – Maison Heinrich Heine (CIUP), Grande Salle

 

Séance présidée par Nathalie Périn (Université Paris 8, LLCP EA 4008)

9h15 – Diogo Sardinha (CIPH) : La discussion inhérente à l’exercice de la philosophie

10h - Christiane Vollaire (Philosophe, collaboratrice de la revue Chimères) : Transmettre au prisme de la rupture

10h30 - Discussion

11h00 - Alain Naze (Philosophe, membre de l’Association « Ici et ailleurs ») : Vers un néo-cousinisme de la laïcité ? Retour contemporain sur La philosophie des professeurs de François Châtelet

11h30 - Danilo Scholz (EHESS) : François Châtelet et le tournant spatial dans la philosophie française

12h00 - Discussion

 

Séance présidée par Christine Goémé (productrice radiophonique France Culture)

13h45 - Ivan Chaumeille (Cinéaste, chercheur en philosophie) : Dionysos écartelé, Léviathan dépecé

14h15 - Hervé Hubert (Psychanalyste) : Une formule lumineuse de François Châtelet sur les contradictions de la psychanalyse

15h15 - Discussion

15h45 - Archive télévisée (I.N.A.), François Châtelet, Producteur : André Halimi, 28/09/1978, TF1, durée 27’55’’

16h15 - Nathalie Périn (Université de Paris 8, LLCP EA 4008) : François Châtelet romancier

16h45 - Vanessa Brito (Ecole Supérieure d’Art et de Design Marseille-Méditerranée) : Périclès et Bartleby : Deleuze lecteur de Châtelet

17h15 - René Schérer (Philosophe, Professeur émérite de l’Université Paris 8) :
François Châtelet, une esthétique non-hégélienne

17h45-18h45 - Discussion et clôture