Séminaire. Spinoza à Paris 8. Séminaire International et Interdisciplinaire de Recherches Spinozistes 2018-2019
Séminaire Spinoza à Paris
Séminaire International et Interdisciplinaire de Recherches Spinozistes
2018-2019
La figure de Spinoza a été présente dès l’origine de la création de l’université de Vincennes. Spinoza était pour Deleuze « le Christ des philosophes ». Badiou accorde une grande place à la clôture spinoziste du fini et à l’extériorité spinozienne de la mort dans L’immanence des vérités (Paris : Fayard, 2018), troisième volume de L’Être et l’Événement. La confrontation des thèses de Foucault et de Spinoza est maintenant de mieux en mieux instruite. La réflexion de Rancière sur les « mécomptes » démocratiques, ou les analyses de Lyotard (par exemple dans Pourquoi philosopher ?) croisent, rencontrent, discutent, les thèses de Spinoza. L’ambition du Séminaire, conformément à l’orientation contemporaine et internationale de l’université de Paris 8, est de montrer comment la philosophie de Spinoza continue à offrir une ressource de pensée dans tous les champs du savoir, de la pratique et de la création.
Université Paris 8 Saint-Denis
02, rue de la Liberté, Saint-Denis (93). Métro « Saint-Denis Université ».
Salle J004 /18h-20h
Entrée libre. Se munir d’une pièce d’identité.
Séminaire International et Interdisciplinaire de Recherches Spinozistes (intégralité des séances en ligne)
Organisé par Charles Ramond, Jack Stetter et Mario Donoso, avec le soutien de l’EA 4008 LLCP.
Responsable Audio-Vidéo Carmen Alves.
Jeudi 29 novembre 2018
Knox PEDEN
« Spinoza et Augustin dans l’histoire du réalisme politique »
Dans l’histoire moderne de la pensée politique, la tradition dite « réaliste » s’oppose au libéralisme par l’accent mis sur les dynamiques du pouvoir aux dépens d’un souci pour le rôle de la morale dans la politique. Aujourd’hui on dit que le réalisme qui était au centre de la discipline universitaire américaine des Relations Internationales pendant la guerre froide a ses racines dans la pensée européenne de l’entre-deux-guerres et en particulier la théologie politique de Carl Schmitt. L’idée est que ce réalisme est réactionnaire au fond et que les mutations dans l’histoire du réalisme – du réalisme classique de Hans Morgenthau au réalisme structural de Kenneth Waltz – ne changent rien à ce trait. Il est évident que les questions concernant la sécularisation de la politique et le rôle de la normativité dans la pensée politique sont en jeu dans cette histoire des idées. Le point de départ de cette intervention est la comparaison que Waltz a établi dans ses œuvres de jeunesse entre la pensée politique d’Augustin et celle de Spinoza. En suivant le théologien américain Reinhold Niebuhr, qui a soutenu qu’Augustin avait été le premier réaliste politique, Waltz estime que les deux sont d’accord dans leur compréhension de la politique et de la psychologie humaine, tandis que l’un poursuit une route théologique et l’autre une route empirique. C’est un jugement ambigu. Mais il n’en reste pas moins que, hormis les proximités supposées de leur visions, leurs métaphysiques sont tout à fait incommensurables. Tout cela revient à poser la question de la possibilité d’un réalisme séculaire, c’est-à-dire la possibilité du spinozisme politique. KP.
Knox PEDEN est Gerry Higgins Lecturer in the History of Philosophy à l’Université de Melbourne. Il a publié Spinoza Contra Phenomenology : French Rationalism from Cavaillès to Deleuze (Stanford University Press, 2014), et de nombreux articles sur le spinozisme, l’histoire de la pensée française, la théorie et la politique de l’historiographie.
Jeudi 14 mars 2019
María Luisa DE LA CÁMARA
« Spinoza tragique »
Il s’agira de réfléchir sur le tragique chez Spinoza, à l ?écart du mythe d ?un philosophe à la joie rayonnante. Au jour nouveau de la modernité, Spinoza et sa philosophie peuvent représenter le conflictuel. Nous proposerons de distinguer une « joie tragique et aurorale » et une « raison chorale ». Spinoza sera vu comme une sorte d ?Antigone de l ?âge classique. Le conflit est d’abord bien présent dans sa biographie. Spinoza ne s ?est pas suicidé certes, mais son immolation symbolique décuple les effets de sa mort civile. D’autre part, au cœur de la philosophie de Spinoza, les affects seront envisagés comme des conflits tragiques –le tragique étant ici entendu comme une nécessité immanente à la vie humaine –ce qui arrive à tous et pas seulement aux héros. Enfin, le spinozisme sera vu comme le lieu de la tragédie de l ?« Ontopotentialogie », de la substance unique à puissance infinie, et de la connaissance. Nous nous demanderons en quel sens on pourrait parler d’une « ontologie tragique » chez Spinoza. Sans substance, pas de modes. Et sans modes, pas d ?être ! ML DLC.
Mará Luisa DE LA CÁMARA enseigne l’Épistémologie des sciences sociales, l’Éthique civique et sur Modernité-Postmodernité à la Faculté des Lettres de l’Université de Castilla-La Mancha. Elle a intégré des groupes de recherche en Espagne (Projet « Galeno latino » / « Galien Latin »), en France (prof. invitée par l ?ENS Lyon en 2014), au Portugal et en Italie. Elle coordonne le Boletín de Bibliografía Spinozista (Anales del Seminario Historia de la Filosofía). Publications en co-édition : El gobierno de los afectos en B. Spinoza (2007) ; Spinoza : De la física a la historia (2008) ; Spinoza y la Antropología en la Modernidad (2017) ; La encrucijada de los afectos. Ensayos spinozistas por Eugenio Fernández (2018).
Jeudi 28 mars 2019
Jack STETTER
« François Lamy : une réfutation cartésienne de l’Éthique »
François Lamy (1636-1711), moine Bénédictin et Cartésien avéré, publia en 1696 Le nouvel athéisme renversé, première réfutation détaillée et développée de l’Éthique en français. Regrettablement cantonnée dans la littérature secondaire, son œuvre anti-spinoziste est riche d’informations historiques et philosophiques. En particulier, ses analyses apportent d’utiles éclairages sur un certain nombre de présupposés cartésiens présents dans la première phase de la réception critique de Spinoza au 17ème siècle. Je donnerai d’abord quelques indications sur la vie de Lamy et sur la réception controversée de Spinoza en France dans les années 1680 et 1690. Je présenterai ensuite un argument central de la réfutation de Lamy, à savoir l’objection cartésienne selon laquelle la théorie spinoziste de l’indépendance conceptuelle des attributs est incompatible avec le monisme de la substance. Comparant l’objection de Lamy avec les questions adressées à Spinoza par ses correspondants de Vries et Tschirnhaus, je montrerai qu’elle est la réponse la plus solide dont dispose Spinoza sur ce point vis-à-vis de Lamy. Pourtant, cette réponse repose sur sa conception très particulière de Dieu. Ainsi, en conclusion, j’aborderai la critique de Lamy selon laquelle la définition de Dieu, chez Spinoza, implique une pétition de principe, et je montrerai ce que cette critique nous dit des motifs principaux de la première réfutation française de l’Éthique. JS.
Jack Stetter est Doctorant (Contractuel puis ATER) en Philosophie à l’Université de Paris 8. Il travaille sur l’histoire de la philosophie du 17ème siècle, et sa thèse s’intitule « Spinoza’s Substance Monism Contextualized / Le monisme de la substance spinoziste en contexte ». Il a publié des articles sur le Traité Politique de Spinoza et sur la métaphilosophie de Deleuze, et édité avec Charles Ramond Spinoza in Twenty-First-Century American and French Philosophy (London : Bloomsbury, 2019). Il fait partie du Comité Scientifique et d’Organisation du Séminaire Spinoza à Paris 8, dont il est un des membres fondateurs.
Jeudi 11 avril 2019
Pedro LOMBA
« Une athéologie du politique. Lecture schmittienne de l’anti-cartésianisme de Spinoza »
Le but de cette conférence est la reconstruction des analyses que fait Carl Schmitt de l’âge classique et des virtualités herméneutiques du concept de “théologie politique”, de façon à souligner la continuité entre la théorie politique schmittienne et sa conception de l’histoire. L’idée de conflit, et de conflit théorique, sera essentielle pour comprendre cette philosophie de l’histoire (de la philosophie), ce qui apparaît clairement dans l’analyse des philosophies de Descartes et de Spinoza. Elle permettra surtout de comprendre l’inactualité de la pensée de Spinoza dans un siècle éminemment cartésien, car si la métaphysique du français sert tout naturellement à la consolidation ou au fondement philosophique de ce que Schmitt appelle “théologie politique”, celle de Spinoza doit être comprise comme sa négation la plus radicale, c’est-à-dire comme la prémisse théorique d’une vraie “a-théologie politique”. PL.
Pedro Lomba enseigne l’Histoire de la philosophie à l’Universidad Complutense de Madrid. Il est l’auteur de Márgenes de la modernidad. Libertinismo y filosofía en el siglo XVII (Madrid, 2014), Ciudad iberoamericana y representación (Madrid, 2017), ainsi que de traductions et éditions de Descartes, Spinoza, Pierre Bayle ou Étienne de La Boétie.
Jeudi 16 mai 2019
Éric ATLAN
« Spinoza et la biologie contemporaine »
Les avancées de la biologie contemporaine, posent de façon nouvelle des problèmes philosophiques anciens. Ceux des rapports entre le vivant et l’inanimé, entre le corps et l’esprit, l’erreur et la vérité, sont les plus évidents. La philosophie de Spinoza, bien que datant du 17e siècle, apporte à ces problèmes des solutions plus pertinentes que la plupart des philosophies plus récentes, développées dans les siècles qui l’ont suivie. En retour, les acquis actuels des sciences physiques et biologiques, notamment des neurosciences cognitives, permettent de porter un nouveau regard sur certaines notions propres à la philosophie de Spinoza, telles que sa « petite physique », la nature cause de soi, la notion de matière, l’essence des choses, les genres de connaissance, qui acquièrent de ce fait un surcroît d’actualité. H.A.
Henri ATLAN est professeur émérite de biophysique aux universités de Paris 6 et de Jérusalem, ancien chef de Service de biophysique à l’hôpital de l’Hôtel Dieu à Paris, fondateur du Centre de recherches en biologie humaine à l’hôpital Hadassah de Jérusalem, et directeur d’études honoraire à l’EHESS, Paris. Il est l’auteur d’une théorie de la complexité et de l’auto-organisation, de nombreux travaux en biologie cellulaire et immunologie, en intelligence artificielle, en philosophie et éthique de la biologie. Dernières publications : Le Vivant post-génomique ou Qu’est-ce que l’auto-organisation ? (Odile Jacob, 2011), Croyances, (Autrement, 2014) et Cours de philosophie biologique et cognitiviste. Spinoza er la biologie actuelle (Odile Jacob, 2018 ).
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